En principe, les détenus disposent librement de leur droit à l’image et de leur liberté d’expression.
Toutefois, l’article 41 alinéa 2 de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 prévoit que « L’administration pénitentiaire peut s’opposer à la diffusion ou à l’utilisation de l’image ou de la voix d’une personne condamnée, dès lors que cette diffusion ou cette utilisation est de nature à permettre son identification et que cette restriction s’avère nécessaire à la sauvegarde de l’ordre public, à la prévention des infractions, à la protection des droits des victimes ou de ceux des tiers ainsi qu’à la réinsertion de la personne concernée. »La réalisatrice d’un documentaire fondé presque exclusivement sur des entrevues de prisonniers s’était vu opposer cet article par l’administration pénitentiaire qui refusait d’autoriser la diffusion du reportage sans floutage des détenus qui s’exprimaient à visage découvert, alors même qu’ils y avaient librement consenti.
Ce refus était officiellement justifié par la nécessité de « respecter l’anonymat physique et patronymique des personnes détenues » et de « veiller au respect du droit à l’oubli de la personne condamnée qui, à son retour à la vie libre doit pouvoir trouver un emploi, un logement, reprendre une vie familiale ».
Les producteurs du film et la réalisatrice en avaient appelé au Ministre de la Culture et au Garde des Sceaux, estimant que cette décision s’apparentait à de la censure et portait atteinte au droit à la dignité et à la liberté d’expression des détenus.
Saisi du litige, le Tribunal Administratif de Paris a annulé le refus opposé par l’ancien ministre de la Justice, confortant non seulement les droits des détenus mais également les droits des auteurs auxquels il était porté atteinte par la décision de l’Administration.
En effet, outre qu’elle n’était pas fondée en droit compte tenu des termes de l’article 41 de la loi de 2009 précitée, la décision initiale portait également atteinte aux droits d’auteur de la réalisatrice qui voyait son œuvre modifiée contre son gré. Les détenus ont ainsi recouvert le plein exercice de leur droit à l’image.
Article rédigé par Margerie Véron, auteur du livre « Le droit d’auteur pour les écrivains »