Peut on protéger un format de livre ?

Ayant particulièrement apprécié la (parodie de) publicité annonçant un nouveau venu dans le monde de l’édition littéraire, je me suis posée la question des moyens de protection d’une collection ultra-poche, qui propose notamment un « sens de lecture à 90° ».

Il n’y a pas eu à ma connaissance dépôt de dessins et modèles. La protection du seul format par le droit d’auteur est loin d’être évidente à mon sens car l’originalité de ce nouveau format est plus d’ordre fonctionnel qu’esthétique, quoique cela puisse être discuté (encore faudrait il pouvoir démontrer l’empreinte de la personnalité de l’auteur caractérisant l’originalité).

Reste la protection contre les éventuels usurpateurs par le bais de l’action en concurrence déloyale.

Une telle action permet, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil (l’article général relatif à la responsabilité civile délictuelle), de faire sanctionner les comportements contraires à la loi ou aux usages du commerce et constitutifs d’une faute (dénigrement, désorganisation de l’entreprise ou du marché, imitation de produits, détournement de clientèle…) de nature à causer un préjudice à un concurrent.

En l’absence de protection par un droit de propriété intellectuelle, la reprise des éléments caractéristiques d’un concurrent ne sera considérée comme fautive qu’à condition qu’elle entraine un risque de confusion dans l’esprit du consommateur.

Les tribunaux sanctionneront alors la reprise de certains éléments caractéristiques d’une collection ou d’une revue par exemple son format, sa structure de couverture (présence d’aplats de couleurs, position de logos, typographie, position des titres, illustration par photographies, présence d’encadrement), son sommaire (pour un ouvrage pratique ou technique par exemple), sa structure éditoriale, ou encore plus particulièrement dans le cas qui nous intéresse, sa maquette intérieure (et notamment le fait que le texte est imprimé à 90° de la reliure), son aspect général (couverture souple due à une reliure cousue)…

Le juge s’attachera alors à déterminer ce qui distingue l’ouvrage initial de ceux de la concurrence, le rendant ainsi identifiable aux yeux des consommateurs.

Ainsi, à mon sens, la reprise du format et des caractéristiques mises en avant par les Editions .2 pèsera considérablement dans la balance si un concurrent s’avisait à reproduire cette collection de manière un peu trop évidente, ce qui s’appréciera au cas par cas.

Article rédigé par Margerie Véron, auteur du livre « Le droit d’auteur pour les écrivains »