Le yoga est une discipline ancestrale reposant notamment sur la pratique régulière de postures, appelées asanas. Avec le succès grandissant que rencontre cette discipline en Occident, nombreux sont les professeurs et autres gourous qui ont cherché à s’approprier méthodes et postures de yoga.
Mais quel monopole peut-on leur accorder sur un art plurimillénaire ?En 2005, il existait 150 copyrights, 124 brevets et 2315 marques liés au yoga aux Etats-Unis.
Un important mouvement de contestation face à cette tendance est né avec le dépôt des 26 postures qu’enchainent les praticiens du Bikram yoga dans une salle chauffée à 40°C avec 40% d’humidité. L’association Open Source Yoga Unity (OSYU) s’était opposée sans succès (mais les parties ont transigé) à cet enregistrement. Peu de brevets ou de copyrights de ce type ont par ailleurs été contestés et annulés, une telle procédure étant assez couteuse aux États-Unis.
Pour éviter les dérives, le gouvernement indien a réagi en créant la Bibliothèque Numérique des Savoirs Traditionnels, consultable par les bureaux de propriété intellectuelle du monde entier afin de permettre de démontrer l’absence d’originalité en cas de revendication de droit d’auteur ou de détruire la nouveauté nécessaire à l’accès à la protection par le droit des brevets.
Cette base de données, accessible en 5 langues, recensent des milliers d’asanas décrits dans les textes sacrés anciens mais concernent également toutes les connaissances médicales traditionnelles afin d’empêcher l’appropriation indue de la médecine traditionnelle de l’Ayurveda qui existe en Inde depuis des siècles.
Depuis la polémique et la mise en place de cette base de données, l’US Copyright Office refuse d’accorder des droits d’auteur sur les enchainements de postures, autrefois considérés comme des chorégraphies protégeables, et aujourd’hui qualifiés de simples exercices physiques ne pouvant donner prise à un droit de propriété intellectuelle.
Un raisonnement similaire me semble parfaitement transposable en droit français.
L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) consacre régulièrement des groupes de travail à la protection des savoirs traditionnels mais de nombreux désaccords subsistent sur l’adoption d’un traité international.
La protection d’accessoires utilisés dans la pratique du yoga ne soulève pas les mêmes problèmes et reste donc beaucoup plus libre. Les brevets en la matière se multiplient dans le monde entier. Ainsi peut-on en France consulter des brevets pour :
– un dispositif permettant la position du corps humain sur les épaules, verticalement, tête en bas,
– un matelas élastique d’un mini-trampoline, permettant ainsi d’augmenter la flexibilité et l’équilibre via l’incorporation d’une surface de fondation difficile et instable,
– un dispositif permettant de pratiquer certains exercices anciens de respiration yogique sans nécessiter l’utilisation des mains, contrôlé par une unité de commande programmable,
– une ceinture de yoga utilisée dans la position de l’arc pour prévenir l’apparition de problèmes lombaires et sacro-iliaques provoqués par l’exercice …
Chaque yogi se fera ensuite sa propre idée sur l’adéquation de ces inventions avec la philosophie du yoga. Namasté !
Article rédigé par Margerie Véron, auteur du livre « Le droit d’auteur pour les écrivains »